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23 août 2023

Transmettre le goût de la vie

Christophe Marchal, champion de « handbike » et membre de la SMLH des Vosges, et Valentin Michel, victimes respectives d’un accident de la route et d’un AVC, témoignent volontiers en milieu scolaire de leur reconstruction. Ils ont choisi de raconter ensemble les obstacles à franchir pour reprendre pied, en particulier auprès de jeunes en difficultés scolaires momentanées, pour leur montrer qu’il est toujours possible de trouver une voie pour se réaliser. Une initiative « Prix l'honneur en action 2022 ».


Valentin Michel est impressionné. C’est sa première intervention devant des élèves ! La rencontre a lieu au lycée agricole de Mirecourt, non loin d’Épinal. Face à lui, des collégiens avec des difficultés scolaires sont venus d’un village voisin pour écouter le témoignage du jeune homme et chercher une motivation pour affronter les échecs scolaires.

Valentin Michel, 30 ans, déroule son histoire, lentement. Les mots ont du mal à venir, de manière aussi fluide qu’avant. Avant quoi ? En 2019, Valentin, sportif et rugbyman, est victime d’un AVC. Les conséquences sont terribles : hémiplégique, aphasique, sujet à des crises d’épilepsie, extrêmement fatigué. Après des mois de combats et d’acharnement pour retrouver ses facultés, il se tient aujourd’hui debout et parle aux élèves. C’est ce parcours de résilience et d’exemplarité qui a été récompensé par le prix L’Honneur en action 2022, afin qu’il puisse témoigner auprès de plus jeunes via une exposition et des interventions. « J’étais un peu stressé devant les élèves, car je suis un peu timide, explique Valentin Michel qui a parcouru à pied en 2022 1 500 kilomètres en partant d’Uxegney (Vosges), où il habite, pour rejoindre Bordeaux, en Aquitaine. Ce périple, même si je n’ai pas pu le faire à pied jusqu’au bout en raison des feux et de la canicule, m’a permis de vaincre une partie de ma timidité et de faire la paix avec mon corps. Les élèves écoutaient bien, ils ne savent pas ce que c’est d’être handicapé, ils étaient curieux d’en savoir plus. »

Ne jamais baisser les bras

Il a raconté ce parcours du combattant pour retrouver les mots, les gestes, marcher, avancer, se tenir droit. « Avant, j’étais maître-nageur, j’avais misé sur ce métier car j’étais jeune et je ne pensais pas qu’un tel accident pouvait arriver, témoigne-t- il. J’ai voulu faire passer le message aux élèves de toujours se battre pour obtenir ce qu’ils souhaitent, ne jamais baisser les bras. Je serais encore en fauteuil, si j’avais renoncé ! Là, j’ai pu rejouer au rugby, alors que mes docteurs étaient frileux mais un neurologue m’a dit oui. Alors je leur ai dit de continuer, de tout donner, même si ça ne va pas bien ! »

Étant toujours fatigué et sujet à l’épilepsie, il doit trouver un autre emploi. « J’ai travaillé trois mois à mi-temps dans une commune grâce à Cap Emploi et Retravailler Lorraine. Là, je dois faire des formations pour trouver une nouvelle voie. »

Une rage de vivre contagieuse

Heureusement, il n’est pas seul devant les élèves. Éric Bœuf, le président de la section SMLH des Vosges, l’accompagne. Greffé d’un rein, il a été sauvé à cause du décès d’une autre personne et en témoigne. À leurs côtés, un troisième « rescapé » : Christophe Marchal. Lui, quand il vient en intervention, apporte son vélo couché qui se pédale avec les mains, un « Handbike ».
À 57 ans, Christophe Marchal a la rage de vivre et compte bien secouer les adolescents. «
La vie n’est pas un jeu, attaque-t-il d’emblée. Quand un médecin dit aux élèves de faire attention à ne pas consommer d’alcool ou de drogues avant de prendre la route, les jeunes n’y font pas attention. Quand c’est moi qui raconte, là ils sont attentifs. Ce n’est pas l’histoire de quelqu’un d’autre, c’est mon vécu ! »

En 1988, il est victime d’un accident de voiture. Un automobiliste lui fonce dessus, son véhicule finit sa course dans le fossé. Lui est blessé aux cervicales, tétraplégique complet. Il a été hospitalisé plus d’un an, a subi 27 opérations et survécu à deux arrêts cardiaques. Et le battant s’était fixé trois objectifs dans la vie : « Retrouver l’énergie, avoir une vie de famille et refaire du sport en compétition. Je me suis lancé ces trois défis il y a trente ans, j’ai mis vingt ans à les réaliser. Mais aujourd’hui, j’ai réappris à vivre autrement, je suis encore en fauteuil car le bas de mon dos est toujours pris et ma main droite n’a pas de force, même si elle fonctionne. J’ai une famille et une fille merveilleuse de 27 ans, Mélanie. Et je suis champion de handbike ! »

L’émotion des jeunes

Avant son accident, il était passionné de cyclisme et champion de cycle-cross. Il a découvert le handbike lors d’une compétition cycliste à Saint-Dié. Il est aujourd’hui double champion d’Europe et a été l’an dernier numéro un mondial pendant quelques semaines. Il a beaucoup témoigné pour la prévention routière et est toujours ému des réactions des jeunes. « Un jour, un mois après une intervention dans un lycée agricole, je recroise un jeune qui vient me voir et me dit : “mon père est mort dans un accident de voiture, je voulais en finir, mais en écoutant votre témoignage, j’ai compris qu’il y avait une vie malgré la détresse. Merci, vous m’avez sauvé la vie”. Je me suis dit que j’avais vraiment été utile ! »

Depuis quelques années, Christophe Marchal a rejoint le bureau de la SMLH des Vosges comme chargé de mission sur le handicap. « J’ai rencontré Éric Bœuf lors d’un concert de Jean-Jacques Goldman à Épinal. Il n’y avait pas de places prévues pour les personnes à mobilité réduite, Éric était dans l’équipe de bénévoles de la protection civile. Il a fait en sorte qu’on puisse avoir une estrade pour suivre le concert ! On a repris contact depuis quelques années et j’ai rejoint la SMLH alors que je n’ai que l’ordre national du Mérite ! ». Une exception à la règle qui convient bien à cet homme exceptionnel !

 

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